La moto filait à travers les rues illuminées, suivie de près par une longue limousine d’un vert criard. Heureusement qu’à la nuit tombée les couleurs se confondaient. Accroché à la taille de son ami, Tatsuya semblait perdu dans ses pensées, ressassant les évènements de la journée. Le brun agissait avant de réfléchir, depuis toujours. C’était seulement lorsqu’il restait seul avec lui-même qu’il pouvait penser et se demander s’il avait agit pour le mieux. Depuis qu’il était sorti de la rue, plus ou moins, les choses de la vie paraissaient plus simples. Ou moins dramatiques. Il devait se l’avouer, son plus grand défaut restait la colère. A chaque provocation, sans compter chaque chose qui sortait de l’ordre qu’il établissait, le plongeaient dans une rage excessive. Et la seule personne qui le maîtrisait se trouvait dans ses bras, conduisant cette Harley noire à une vitesse un peu trop élevée. Lui et Akira possédaient un pouvoir étrange. Et justement, Kaerizaki sortait de son ordre établi. Il le savait depuis longtemps, le rouquin, avec tact, le lui avait révélé il y avait de cela quelques mois. Mais le leader n’en avait jamais fait mention. Le sous-entendu planait, comme une menace et à chaque instant, Tatsuya se demandait quand est-ce qu’il passerait à l’action. Tous ses gestes, il les calculait, toutes ses remarques qui volaient au-dessus du bassiste et d’Hideaki, semblaient s’accrocher à lui et soulevaient son instinct défensif. Il devait mettre les choses au clair à présent. Après la scène à laquelle il avait assisté. Et qui lui confirmait brutalement la réalité. Le sentiment qu’il ressentait mêlait ce malaise physique sur l’identité sexuelle de son meilleur ami, qui s’insinuait comme un poison et provoquait un rejet presque brutal, et parallèlement la honte, directement liée à ce malaise. Quelque chose de compliqué en somme. Comme pour faire passer tout ce bourbier intellectuel, il lançait des phrases assassines, visant à le blesser ou à le faire réagir. Et vu que cela ne fonctionnait pas, il y allait plus brutalement, se sentant frustré lorsque cela n’aboutissait à rien. Il avait pris conscience que ce comportement tuerait leur amitié. Mais la communication ne faisait pas partie de ses qualités. Comment cela se terminerait-il ?
Kaerizaki bifurqua brusquement entre deux buildings. La ruelle semblait assez grosse pour y laisser passer la limousine. Désormais, Tatsuya connaissait par cœur ce bout de chemin, l’ayant emprunté un nombre incalculable de fois. Il savait que les constructions modernes et sans âme laisserait peu à peu la place à un immense parc, un jardin clôturé à l’abri des regards où se dresserait une magnifique maison. Un manoir. Cette bâtisse représentait pour lui, comme pour les autres de Dolce Alba, une sorte de cachette. Là, chaque brin d’herbe, chaque arbre, chaque fenêtre, meuble ou tapis possédait une longue histoire. Là, tout se révélait pour ce qu’il représentait : un tableau montrait des hommes condamnés par la société mais qui dans cette maison restaient de simples humains. Ils éclataient en couleurs, en clairs-obscurs surprenants où sentiments et Histoire se mêlaient. Et le guitariste se sentait proche de ces gens dont il avait écouté la vie par la bouche de Yume. La mère de Kae, décédée il y a deux années à peine. Son cœur se serra.
Descendant de l’engin, il s’assit devant la porte, attendant la limousine et le batteur de Dolce Alba, fumant tranquillement sur le paillasson. Que de souvenirs. Le jeune homme ne remarqua pas Kaerizaki s’asseoir à ses côtés et sursauta.
- Encore en train de chercher à me choper, fais gaffe, je te tiens à l’œil, sale pervers, aboya Tatsuya.
Il se mordit les joues.
- C’est mon but dans la vie, tu sais, plaisanta Kaerizaki.
Silence.
La voiture verte débarqua dans leur champ de vision.
- Kae…
- Mh ?
Le brun tripatouilla sa clope nerveusement, grattant le sol du bout de l’ongle.
- Ca va, Tatsuya, enchaîna le garçon aux cheveux noirs.
- Je comprends pas… Je veux dire. T’avais toutes les filles à tes pieds, et du jour au lendemain, t’as… t’es…
- Dis-le, allez, joua Kae en l’incitant.
- Devenu homo, cracha Tatsuya.
Un léger sourire éclaira le visage pâle du leader, se penchant en arrière. Ils étaient toujours devant la porte, comme deux abrutis.
- Je l’aime vraiment, Tatsuya.
- J’arrive pas à comprendre, insista l’autre, ne voulant pas entendre.
- Comment faire simple… C’est différent pour chaque personne, hein. Yukito me maîtrise. Il se fout de mes origines, de mon sang, de mon argent. Bon, j’avoue, j’ai l’impression parfois que c’est que pour mon cul qu’il loge chez moi. Mais c’est rare.
Tatsuya s’étrangla, provoquant l’éclat de rire de son ami.
- J’avais besoin d’un mur, Tatsuya. Qui me dise stop, qui s’amuse de ma force et critique mes faiblesses. Les gens sont soit faux-cul, soit trop coincés pour être sincères.
- Mais c’est un mec.
- Oui, c’est un mec, termina Kaerizaki.
Le silence retomba, les enveloppant lentement sous les étoiles alors que le batteur des Bad Mint faisait irruption dans le jardin.
- Tu joues la fille…
Kaerizaki tourna brusquement le visage vers son compagnon, explosant à nouveau dans un rire sonore. Voilà où était le problème alors ? Le brun envoya un coup de poing à son chanteur, alors que ce dernier se tenait les côtes, les larmes aux yeux.
- T’es vraiment con, Tatsuya, vraiment con !
- Ta gueule !
Shika approchait, faisant escale dans le jardin illuminé par quelques lampions ronds.
- Il n’y a pas de jouer la femme ou l’homme.
- Mais il te sautait !
- Et alors ? C’est comme pour les mangas yaoi, uke, seme, ça existe pas, annonça Kaerizaki. Enfin, en théorie.
- En théorie ?
- Yukito… murmura-t-il en se grattant la joue, prend au sérieux ces conneries. Il est très.. immature dirons-nous, sur certaines choses. S’il m’entend il me tue, ajouta-t-il en riant.
Tatsuya leva les yeux, la voix bruyante de Shika ayant percuté ses oreilles. Devant eux, le bonhomme de vert vêtu semblait excité au possible. Se trouver dans un environnement inconnu paraissait le réjouir au plus haut point. Et là, sans qu’il ne se l’explique, il vit un personnage aux oreilles pointues, portant une tunique verte et à ses côtés, une petite fée voletant en l’engueulant à chaque geste.
- Allez, on rentre. Je vais te montrer ma demeure, s’exclama Kae en se levant, s’adressant à Shika. Bienvenue.
Shika regarda autour de lui en se tordant doucement les mains. Il n’avait jamais vu un manoir comme celui-là… Sa maison à lui était un vrai château japonais avec 5 étages, dont un lui était réservé… Son jardin faisait environ cinq fois la taille du sien, mais celui de Kae avait un petit quelque chose en plus… Apparemment, celui du chanteur des Dolce Alba était construit avec amour… Le sien… Il ne savait le décrire, mais il semblait trop strict maintenant… Trop sévère, avec ses arbres bien taillés tous les jours et énormes, ses plantes qui n’en finissaient pas mais qui n’avaient aucune âme… quand Kae l’invita à entrer, il fronça les sourcils.
- Nous devions aller retrouver Grim et Cana non ? Que fait-on dans cette bâtisse ?
- Tu ne m’as pas écouté avant, Shika san ? Ils nous rejoignent, déclara gentiment Kae en s’inclinant poliment. Cesse de t’inquiéter pour tes amis.
Shika se gratta la tête… Il commençait vraiment à s’inquiéter pour eux. Mais devant le sourire rassureur de Kae, il soupira d’aise. Shika entra dans le manoir et, dans un cri très personnel à lui-même, tomba sur le sol. Il se releva doucement en se grattant les fesses.
- Aieuh !
Il mit soudain son pied sur le sol et rit.
- Ah ça me rappelle à Tomuchan, ma demeure secondaire ! Je pouvais patiner sur le sol ! C’est grâce à ça que j’ai pu devenir l’un des meilleurs en pâtins à roulette dans les courses de rue ! C’était Grim qui était content de m’avoir dans son équipe !
Et Shika rit en enlevant ses chaussures. Il fit alors glisser ses pieds sur le sol, comme s’il avait des pâtins à glace. Visiblement, Shika était à l’aise dans cette demeure. Il esquiva quelques colonnes, riant en voyant Tatsuya lui gueuler dessus de faire gafe à un vase. Tatsuya hurla encore en le voyant foncer contre un mur. Même pas surpris, le lutin posa son pied contre le mur et fit une pirouette en arrière, atterrissant sur ses pieds et se frottant la veste, l’air de rien. Il retourna près du garçon aux cheveux noirs et celui aux cheveux bruns en riant.
- Gomene, gomene ! Je me suis laissé emporter ! Dis voir Kae-san, j’ai cru voir des tableaux connus dans cette pièce ! Je ne pensais pas que tu aurais le 2e exemplaire de ce tableau-ci !
Shika pointa en direction d’un tableau aux couleurs douces. Il y avait une jeune femme dessus, de dos, qui fixait l’océan d’un regard taciturne. La mer semblait déchaînée.
- Je sais que son auteur, je ne me souviens plus son nom, avait fait deux tableaux identiques et que le 1er a été acheté par mes parents à une somme exorbitante ! Une somme avec cinq zéros à la fin il me semble… Bon c’est pas grande chose pour mes parents d’après ce qu’ils ont dit… Ils ont même rajouté que grâce à cette somme, l’auteur avait pu vivre de nombreuses années sans avoir à se souci d’argent… T’as bien de la chance d’avoir un tableau pareil en ta possession !
Les deux garçons restant, vissés devant la porte, observaient Shika faire l’idiot dans le corridor. Tatsuya s’emporta soudain, hurlant des insanités envers le lutin, lui intimant l’ordre de faire attention aux choses qui l’entouraient. Kae, quant à lui, fronçant les sourcils, se gratta la joue, perplexe. D’un coup du pied droit, il ferma la porte. Ôtant sa veste, les mots du petit brun le firent tiquer. Tatsuya remarqua sa réaction et enlaça le lutin, l’emmenant dans le vaste salon.
- Va voir si ton Yukito est réveillé. Je m’occupe de lui, aboya-t-il.
- Bien.
Shika riait en se faisant entraîner au salon. Il fixa soudain Tatsuya en souriant amicalement.
- Dis voir, tu es de quelle famille toi alors ? Kae semble super riche, mais et toi ?
Le brun, crispé, voulait se passer les nerfs sur une cigarette. Ce garçon lui tapait royalement sur le système. Directement liée à l’immense salon, une cuisine américaine lui offrit le luxe de se servir à boire.
- Tu veux un truc ? demanda-t-il brusquement. Je suis d’une famille merdique, qui vaut même pas la peine d’être énoncée. D’autres questions ? Et évite de parler de famille avec Kae…
Shika le fixa et s’assit sur la table de la cuisine en tailleur, observant Tatsuya qui buvait en face de lui.
- Une famille merdique ? Je ne pense pas non… La mienne aussi est très étrange… Ils sont toujours occupés à mettre leurs masques sur le visage et paraître ce qu’ils ne sont pas vraiment… Moi je n’ai jamais voulu être quelqu’un d’autre et j’ai trouvé Grim et Canaan qui m’ont accepté tel que je suis… Pour moi, eux tous sont ma famille, car ils m’ont permis d’arriver jusqu’ici et de devenir ce que je voulais vraiment ! Je ne pense pas réellement tu ne veuilles pas en parler… C’est grâce à eux que tu as pu entrer à Dolce Alba non ?
Puis Shika se leva et lui donna une tape sur la poitrine.
- N’oublie jamais que tout est important dans la vie… Chaque rencontre, chaque événement, chaque rêve… Il en est de même avec Kae, j’en suis sur…
Tatsuya haussa un sourcil pendant que le jeune Shika lui racontait sa vie. Il recula d’un pas, se penchant sur le lavabo pour se laver le maquillage autour des yeux.
- T’as pas besoin de me faire la morale, trancha-t-il, dos à Shika. On doit forcément mettre un masque. On vit dans une putain de société de faux-culs.
Se redressant, il foudroya le batteur des yeux.
- Tu ne connais pas Kae. Alors arrête d’essayer de le psychanalyser. Tu veux à boire ou pas ? enchaîna le brun, s’appuyant contre le frigo.
Shika le fixa, puis il donna une tape sur la tête de Tatsuya. Ce dernier allait s’abaisser sous le coup, mais Shika lui entoura le cou de son bras.
- Grim était comme toi aussi… « Oh quelle société pourrie ! », « je hais le monde »… Putain ce masque vous le mettez parce que vous en avez envie, non pas parce qu’on vous force ! Alors arrêtez de subir et agissez !
- Mais de quoi tu parles ? aboya Tatsuya en se dégageant de l’emprise de Shika. Tu crois tout connaître, mister perfection ? Toi qui vient de je sais pas trop où et qui se permet d’afficher ses goûts de luxe exubérant en gueulant que si on veut on peut ? Allez, bois et ferme-la. Des idéalistes comme toi, ça court les rues.
- Et c’est en étant idéaliste que tu vas progresser, pauvre idiot ! Regarde Shiroi ! Shiroi a commencé dans la rue aussi, mais il n’a jamais fait ce que les autres voulaient et a su se donner les moyens pour arriver jusqu’ou il est ! Shiroi est lui-même sur scène et dans la vrai vie et c’est ce qui fait son charme nom d’un chien ! Grandis un peu !
Et Shika l’abandonna là, revenant sur ses pas, glissant sur le pavé du couloir. Tatsuya resta là un moment, puis grogna, ouvrant la porte coulissante du salon qui menait directement à un large balcon. Shiroi, Shiroi, ce nom lui sonnait vaguement familier. D’un coup, il éclata de rire. Bruyant, cassant, désespéré, il dû s’accrocher à la barrière. Cela ne servait à rien de parler avec quelqu’un qui n’a pas vécu la rue, vécu le malheur. « Crétin ! » hurla-t-il aux ombres. La nuit profonde enveloppait depuis longtemps ces lieux et en face, se dressait un immense building moderne, où quelques lumières faiblardes jouaient sur les étages. Tatsuya s’alluma une cigarette, écumant de rage… A part ceux qui se sont trouvés dans la merde jusqu’au cou peuvent comprendre. Ceux qui prétendent détenir la vérité en ayant été choyés toute leur vie dans des draps de soie, cajolés par des parents affectifs, ne peuvent pas saisir la profondeur de cette amertume. Et les gens comme Shika, prétentieux aux mains propres, lui tapaient royalement sur le système.
- Kae s’est embourbé pour comprendre, pas comme ce crétin de fils de riche. Avec son argent, il se permet tout. Qu’est-ce qu’il imagine ?
Tatsuya tira sur sa clope.
- Il doit s’envoyer en l’air maintenant. Ah, ces pédés sont dégoûtants… murmura-t-il, sourire aux lèvres.
D’un coup, au loin, des phares aveuglants déchirèrent le manteau pesant de l’obscurité. Akira et Hideaki étaient de retour.
- Yuki ? Tu dors ?
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Le jeune homme se pencha au-dessus du tas de couvertures, observant la créature qui s’y terrait avec une certaine crainte. Sa méfiance fut fondée : l’homme dormant dans son lit l’empoigna et le renversa. Kaerizaki ne sut plus où se trouvait le plafond et le sol, plongé dans la pénombre, il atterrit sur le matelas moelleux, rebondissant légèrement. Ses lèvres s’entre-ouvrirent, le temps de quelques secondes pour lâcher une note unique, avant que la bouche du rouquin la scelle longuement. Sans un mot supplémentaire, son amant les couvrit, arrachant presque les vêtements du plus jeune pour se jeter sur lui, pour le dévorer.
Quelque chose de brutal et primaire. Dur, violent. Dans le silence, ponctué par des soupirs. Gémissements. Râles. Et encore, encore, les draps se froissent, les gouttes de sueur se mêlent. Ah, plaisir. Intense. Des coups de butoir, toujours plus loin! Et la seule manière de dire "je t'aime".
Le brun ouvrit doucement les paupières assombries par du crayon et du rimmel ; maquillage inquiétant du concours. La respiration lourde, les traits foncés striant ses joues, il se fourra dans les bras forts du rouquin, lui mordant l’avant-bras. Une claque sonore le fit geindre, suivie d’une phrase dans le genre « on devait finir ce que l’on avait commencé là-bas ». Yukito le serra contre lui, s’accrochant comme une pieuvre à son rocher. Cette possessivité presque puéril plaisait au Shina, qui ne se gêna pas de lui colorer la poitrine avec les restes de son maquillage. Là, isolés de tout, cachés sous les couettes chaudes, ses jambes entrelacées dans les siennes, son souffle chaud contre sa nuque, son odeur musquée enivrant ses sens, Kae en oubliait même ses manigances.
- J’ai pas envie de redescendre, maugréa-t-il, empêchant Yukito de lui pincer les fesses.
- Ne redescends pas, c’est simple.
- J’ai des invités et ça fait un moment que je suis parti.. hm.
- Tu projettes quoi comme plan machiavélique encore ? murmura le rouquin, s’étirant dans tous les sens.
Le brun rit doucement, lui mordant le cou avant de se relever paresseusement. La main de Yukito se posa dans son dos, caressant du bout des doigts une longue trace rosâtre qui lui barrait les omoplates. Fermant les yeux, le jeune homme se laissa faire, jusqu’à ce que ces cajoleries se transforment à nouveau en agressions ; les ongles dans sa peau blanche creusaient ses anciennes blessures. Il poussa un soupir, s’asseyant au bord. Il grogna une excuse – laver le maquillage et le sperme – pour pouvoir se libérer. Malgré cela, le rouquin se percha contre son dos, continuant ses inspections. Précis, ses doigts retravaillèrent le torse de Kae, comptant une à une les autres marques. Ah, qu’il aimait ce corps mutilé ! L’index frôla une incision le long des côtes du chanteur, bizarrement plus précise que toutes les autres. Un Y. Il croqua l’oreille de son amant, descendant son doigt. Un U. Sa langue se glissa à l’intérieur, déviant contre la joue giflée par ses soins un instant avant. Un K. I.
- Tu es vraiment mignon, Kae. Tu ne résistes pas ? se moqua le rouquin.
- Plus la force, répondit son amant en frissonnant.
- De toute manière tu m’es soumis. A moi corps et âme, mh. En ce moment tu n’as pas le droit de te rebeller.
Ce à quoi Kaerizaki répliqua par un sourire satisfait. T. Et enfin, un O.
- Il va falloir refaire ça, murmura l’homme aux cheveux courts.
Kae grogna, excité mais mécontent en même temps. Puis brusquement, Yukito le souleva pour le jeter sur son épaule, direction la salle de bain derrière la porte interne de la chambre. Il marchait au rythme des claques contre ses fesses, infligées par un gamin aux cheveux ébène et aux yeux émeraude qui savait pertinemment ce qu’il risquait en faisant cela.
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Nouveau
Shika soupira derrière le jeune garçon et croisa les bras sur sa poitrine. Décidément, les gosses ne comprennent jamais rien à rien… On sonna soudain à la porte et Shika sauta sur place, changeant complètement de caractère.
- Ils sont là !! Cana !! Grim !!
Tatsuya frissonna lorsque Shika se mit à hurler comme un psychopathe, se tournant doucement pour voir ce qu’il se passait. Le jeune homme en vert courut comme un dératé et ouvrit la porte dans un bond, sautant sur le premier venu qui n’était autre que… Hideaki. Sous le poids du garçon, Hideaki tomba en arrière sur Grim qui grogna toutes les insultes du monde en recevant contre lui les deux garçons.
- Shika !!
Le blond ne réagit pas, enfermant dans ses bras par réflexe la boule électrique qui venait de l’agresser. Shika ouvrit les yeux et fixa Hideaki. Il rit soudain et se releva, s’excusant. Il aida alors le garçon à se relever et éclata de rire en voyant Grim se relever tout seul. Il sentit un regard noir derrière lui et observa Canaan. Ce dernier lui jetait un regard outragé et obscur, indiquant qu’il allait certainement le tuer prochainement. Shika eut une sueur froide et recula un peu.
- Cana… Ca ne va pas ?
Ce dernier grogna quelque chose, puis prit par la main Hideaki et rentra dans le manoir. Shika ne comprit pas et fixa Grim, les joues roses et l’expression d’un idiot sur le visage.
- Grim ! Mon ami !!
Il bondit sur le dos de Grim et pointa son bras vers l’avant. Grim soupira, mais lui raffermit les jambes autour de sa taille.
- Tu es drôlement en forme ce soir, Shika…
- Pourquoi Cana a pris la main d’Hideaki et pas la tienne ?
Grim hésita à foutre par terre le tant nommé lutin, mais se retint de justesse.
- Cana est peut-être tombé amoureux de lui…
Grim sentit le garçon enfoncer d’avantage son humeur dans les abîmes, mais s’avança vers la maison sans un mot.
- Il ne t’aime plus ?
Grim serra les dents, puis tourna son regard noir vers lui.
- Ta gueule, le nain de jardin !
- Ahaha ! Ca faisait longtemps que tu m’appelais plus comme ça !
Akira observait la scène, un peu en retrait, ne sachant pas comment prendre les évènements. En voyant la réaction de Canaan, un faible sourire fendit son visage. Il semblerait que tout aille dans le bon sens… Refermant la porte, il s’excusa gentiment, plongeant sa main dans les poches de sa veste. Il devait appeler chez lui, et avertir sa chérie qu’il ne rentrerait pas cette nuit.
Shika, à côté, toujours sur le dos de Grim se laissa tomber un peu en arrière.
- Tu appelles qui ?
- Arg ! Shika, fais gaffe ou je te laisse tomber, compris ?!
Shika rit et lui tira les joues tout en fixant Akira, espérant une réponse…
Ce dernier gesticula, articulant de manière à ce que le lutin le comprenne : « Co-pi-ne ». Et le regard de Shika s’assombrit.
- Ah… Ca me rappelle ma fiancée…
Hideaki se faisait trainer, observant en silence le garçon aux cheveux bleus. Canaan se rendit soudain compte de la situation et rougit violemment. Du point de vue d’Hideaki, on aurait dit que de la fumée surgissait du bleuet. Qu’est-ce qui lui avait pris exactement ? Il ne le savait pas, mais ayant vu Shika dans les bras du blond, il son caractère se muta brutalement… Lui et son foutu caractère… Sûrement que le blond le trouvait étrange maintenant… Passant à côté du canapé, Hideaki se laissa tomber sans autres cérémonies, entraînant le chanteur à sa suite, en se délectant du petit cri de surprise du garçon aux cheveux bleus, son visage complètement inexpressif. Un grognement lui indiqua que Tatsuya venait de rentrer. Canaan fixa le guitariste des Dolce Alba, mais en voyant son regard noir, sembla se tasser sur lui-même et réfugia son visage contre la poitrine d’Hideaki.
- Alors, il s’est passé quoi ? demanda Tatsuya sur son ton habituellement bourru.
- Bah… commença le batteur de Dolce Alba. Je t’explique…
Et il se lança. Sa voix monocorde et son ton lent finirent par énerver le brun, qui, d’un pas précipité, s’empressa d’aller questionner l’homme aux chaînes, occupé à expliquer à sa copine qu’il allait fêter le concours chez les Shina, plutôt que d’aller souper avec elle dans un restaurant.
A présent calme, Hideaki resserra son emprise sur Canaan, toujours étalé sur lui. Le bleuet ouvrit de grands yeux en sentant la main du blond sur son dos, le carressant doucement. Il releva son visage, sur le point de lui demander ce que sa patte faisait là, quand il rougit soudain. Le blond lui lançait un sourire carnassier et ça le gênait péniblement. Il lui souffla doucement dans l’oreille, la lui mordillant quelques secondes après. Et Canaan sursauta en gémissant et saisissant son oreille.
- Ahh !
Le chanteur se crispa en entendant son propre petit cri de plaisir. Il plongea sa tête contre la poitrine du blond, se maudissant. Il avait été perverti…
- Tu es possessif… ? murmura en ricanant Hideaki.
Canaan ouvrit de plus grands yeux et tira sur le pull de Hide, se couvrant entièrement le visage. Il grogna un petit truc que Hide trouva adorable et ne bougea plus.
Les dents du jeune homme aux yeux glacés s’amusèrent contre la nuque où quelques mèches bleues s’attardaient lorsque leurs compagnons d’armes entrèrent. Akira, bouteilles en main, s’avança juste derrière… Un Shika chevauchant la bête enragée qu’était Grim. Et le visage du blond fut éclairé par un sourire satisfait. Tandis que celui de Grim s’effritait.
- Lâche-le, le blond décoloré ! Cana, viens ici ! On ne sait jamais avec ces bêtes-là…
Grim s’avança vers lui. En voyant Cana, le roux saisit le bleuet par col, puis le tira en arrière. Il prit alors le lutin par le col aussi et tenta de le mettre à la place de Cana. Mais il n’avait pas prévu que Hideaki ne lâche pas le chanteur de Bad Mint. D’un mouvement souple, il roula sur Canaan. Ce dernier se retrouva sous le corps fin du blond, seul à seul avec les yeux bleus et absents du batteur de Dolce Alba. Canaan resta complètement paralysé et observant les alentours à la recherche de quelqu’un pour le sauver. Un poids s’abattit soudain contre le blond, et lentement, Hideaki releva le visage.
- Fais-toi les dents là-dess… Lâche-le de suite !
- Eh oh Grim ! Je ne suis pas une marchandise !
Ignorant les jérémiades des enfants derrière lui, le batteur s’installa entre les cuisses de Canaan, posant son visage au creux de son cou, demandant grâce.
- Ils sont bruyants… chuchota-t-il plus pour lui-même.
Vu que le garçon ne semblait pas réagir, ses doigts fins attrapèrent le visage à quelques centimètres de lui. Il lui tourna doucement le visage, portant son poids sur le bras valide de Canaan. Appuyant contre les joues pour qu’il ouvre les lèvres, il y glissa sa langue. Canaan rougit encore plus, si vraiment c’était possible et ferma les yeux. Il se laissa soudain couler et apprécia les quelques secondes avant qu’il n’entende un énrome cri de rage. Il rouvrit les yeux pour voir un Grim avec une aura noire autour de lui. Il le fixait comme s’il allait le tuer dans les quelques minutes qui allaient suivre.
- CAAAANNNNNNNAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAANNNNNN !!
Akira, qui vaquait à ses occupations, déplorait la scène qui se déroulait devant ses yeux. Secouant la tête, il se dépêcha de sortir les bières du frigo ainsi que quelques verres. Dans son coin, Tatsuya ouvrait les bouteilles de vodka et différents alcools que le rouquin aux cheveux pointus s’était procuré.
- Je savais pas que le schtroumpf puceau était le type d’Hideaki…
- Le quoi ? répondit Akira en se tournant vers le bassiste.
- Mais ouais, Canaan, grogna Tatsuya.
Le rouquin le jaugea en silence, ne sachant pas s’il devait rire ou pas.
- Je ne pense pas que cela vienne directement de lui, finit-il par avouer.
- Bah, on dirait qu’il prend son pied, acheva Tatsuya.
Canaan essaya de faire lâcher prise Hideaki, mais il dû se l’avouer, le baiser du garçon était… Savoureux… Et il referma doucement les yeux… Quand il les rouvrit, Grim avait son visage près du leur.
- Je vous dérange pas, j’ESPERE…
Il saisit l’oreille de Canaan et le tira de côté. Canaan grimmaça de douleur et dû se dépêcher de suivre le roux qui râlait de toute son âme. Shika les vit partir et sourit perversement à Hide.
- Il te plait bien notre petit chanteur hein ?
Le blondinet ne lui répondit pas, trop occupé à se masser les oreilles, à moitié sourd suite au hurlement démoniaque de Grim.
Shika rit de bon cœur et soudain se mit à reniffler.
- Oh… Ca sent… La… Vodka…
Il se sentit instinctivement attiré vers la bouteille que Tatsuya avait à la main. Quand il arriva, il la lui arracha des mains et commença à la vider goulûment.
Le guitariste observa les gens autour de lui s’agiter comme des fourmis, n’ayant pas le temps de verser dans un verre le liquide précieux qu’il avait à la main qu’un rapace l’attaqua presque. Il laissa couler, perplexe. Se tournant ensuite vers Akira, sourcils froncés, il le questionna.
- C’est dégueulasse ce qu’il se passe ici ! Ca te fait rien ? râla-t-il.
- Je dois avouer que j’en ai eu des frissons en voyant la scène, avoua le rouquin hérisson en ricanant.
- Ils sont tous homos ici ? poursuivit Tatsuya, se tournant vers Shika. Toi aussi t’es de ce bord là ?
Shika s’arrêta de boire et failli s’étouffer. Il toussa comme un perdu et fixa Tatsuya, des larmes de douleur aux yeux.
- Moi ? Homo ? Nan… J’ai… Une fiancée…
Le ton de la voix de Shika semblait stressé et plein d’angoisses. Shika observa la bouteille à moitié vide, puis la leva devant ses yeux.
- Ouah ! C’est moi qui l’ai vidée ainsi ?
Pendant ce temps, Tatsuya fronça les sourcils, un air interrogateur se forgeant sur son visage d’adolescent.
- Ca veut rien dire tu sais. Kae sortait facilement avec des filles et un jour on a apprit que…
- C’est bon, Tatsuya, le coupa Akira sans le regarder.
- Bon, oui ça se dit pas. Mais voilà, poursuivit le jeune, assez embarrassé. Et t’as l’air vachement heureux d’avoir une fiancée. Genre fille de bonne famille imposée ?
Shika le fixa, incrédule.
- Comment tu as su ?
Il rabaissa son regard et continua de vider tranquillement la bouteille.
- Ce n’est pas que je ne l’aime pas mais…
Shika rabaissa sa bouteille vide et soupira.
- Mais elle a failli me tuer ! Elle m’a fait ligoter sur son lit par seize hommes balèzes, puisque quatre ne suffisaient pas, et m’a chatouillé jusqu’à ce que j’accepte d’être son fiancé ! J’ai failli me tuer avec ça ! Quand tu la vois te torturer avec un sourire angélique plaqué sur le visage, ça marque ! Honnêtement, si elle est comme ça à douze ans, je n’ose pas l’imaginer à dix-huit ans…
Et Shika semblait l’homme le plus malheureux au monde, sous le regard effaré de Tatsuya. Ce dernier ne savait pas s’il devait le prendre au sérieux ou éclater de rire.
Akira attrapa la seconde bouteille, servant dans les verres. Il lança un coup d’œil au membre des Bad Mint, réprobateur.
- J’espère qu’ils vont se calmer, murmura-t-il.
Soudain, un bruit se fit entendre des hauteurs. Des pas résonnèrent sur les escaliers. Les trois garçons de Dolce Alba sortirent la tête dans le corridor, voyant leur leader arriver calmement, s’aplatissant les cheveux contre son crâne. Il se massait les poignets.
- Kae… Yukito a décidé de dormir ? demanda poliment Akira.
- Oui…
Lentement, Hideaki passa un bras autour des épaules de son compagnon, lui faisant un clin d’œil. Le sous-entendu passa immédiatement.
- Tu veux boire quelque chose, Kae ? grogna Tatsuya.
- Du coca, je meurs de soif… et pourquoi Grim et Canaan se gueulent dessus ?
- La faute à Hide, il arrive pas à tenir sa queue en place, balança Tatsuya. Note, on est entourés de… ah pardon, Kae.
Le jeune homme aux cheveux noirs lui balança une droite contre l’épaule, plus pour le symbole que par réelle intention de blesser. Il se détacha de son groupe, allant rejoindre les deux invités dans le couloir, toujours occupés à s’engueuler.
Canaan observa Grim avec rage.
- Je fais encore ce que je veux, Grim !
- Ouais, je vois ça… Mais si t’as l’intension de coucher avec n’importe qui, fais juste gaffe à ne pas salir le nom du groupe !
Canaan se tut. Il avait une envie folle de giffler ce muffle devant lui mais se réavisa. Pour Grim, le plus important était le groupe Bad Mint… Et il savait qu’ils avaient sué sang et eau pour en arriver ou ils étaient arrivés… Il se gratta doucement la tête tout en fixant le sol, l’air boudeur…